La formulation de ces clés n'engage que leur auteur, qui puise tant dans ses recherches et sources d'information que dans son imaginaire leurs révélation et libre mise à disposition suivant la forme et la rédaction retenues.

Il n'y a de ce fait rien à prendre pour argent comptant, seulement à laisser faire en soi le processus d'ouverture de conscience par le discernement, soit le juste équilibre entre cœur et raison. Celui-ci conduira à les invalider, à les valider, à les compléter par d'autres ajouts et compléments.

C'est ainsi que procède le chercheur de vérité.

 

 

Processus de transformation de conscience (2) : la désintégration positive

 

Si la théorie de la "désintégration positive" du psychologue, psychiatre, médecin, écrivain et poète polonais Kazimierz Dabrowski explique tout particulièrement pourquoi les surdoués, enfants comme adultes, peuvent être plus particulièrement prédisposés à la dépression, elle établit les types de processus de transformation pour le changement de conscience et l'évolution de l'être humain. En effet, son observation des personnes hypersensibles dans l’un ou plusieurs des cinq domaines - intellect, émotions, imagination, psychomotricité et sensualité - lui a permis de comprendre comment elles perçoivent la réalité d’une façon plus intense et sous plusieurs angles à la fois :

- L’hypersensibilité intellectuelle les conduit à réfléchir et à poser des questions.

- L’hypersensibilité émotionnelle les rend plus sensibles aux questions de moralité et d’équité.

- L’imagination qui est hypersensible les conduit plus facilement à voir comment le monde pourrait être.

Sa théorie prend appui sur le fait que l’environnement social est souvent une gangue pour l’autonomie et son ajustement personnel à une société considérée comme "primitive et confuse", qui freine le développement et entrave la possibilité de découvrir sa nature profonde et d’exercer son choix dans la façon dont on veut se développer et dans les directions que l’on veut prendre. Qui plus est, le fait de devenir plus conscient de l’étendue et de la complexité de la vie et de sa propre culture pouvant conduire à ressentir le doute, l’anxiété et la dépression, la théorie permet de comprendre que, aussi inconfortable que soit l'éveil, il se fonde sur autant d’étapes nécessaires à un développement personnel avancé.

L'éveil repose sur ce que Dabrowski a appelé le "troisième facteur", cette force intérieure, largement innée, qui pousse les gens à être plus déterminés et à contrôler leurs comportements en fonction de leur matrice personnelle de croyances et de valeurs, et non pas en fonction des conventions sociales ou même en fonction des besoins biologiques. Ce troisième facteur permet aux gens de vivre leur vie en toute conscience, délibérément, en agissant en accord avec leurs propres valeurs personnelles. La dynamique de ce troisième facteur conduit les gens à l’introspection, à l’auto-formation, à l’auto-développement et leur permet de se réaligner avec eux-mêmes à un niveau supérieur - la supraconscience - qui leur permet de transcender leur environnement grâce à une moralité et un altruisme élevés. Ils passent ainsi d'un mode en "Service de Soi" à un mode en "Service d'Autrui". Si certains individus peuvent cependant se désintégrer sans arriver à se réaligner à ce niveau supérieur, ils ne restent toutefois pas au même niveau qu’avant.

 

Les stades de développement personnel

En avançant en âge, les opportunités de développement personnel que les gens rencontrent dans les épreuves de la vie les sensibilisent toujours plus aux problématiques existentielles, augmentant la possibilité de survenue d’une dépression existentielle. C'est ce qu'ont démontré les psychanalystes états-uniens Erik Erikson (1959) et Daniel Levinson (1986), ainsi que la journaliste Gail Sheehy (1995, 2006).

De 18 à 24 ans : "On s’arrache" du nid familial.

De 25 à 35 ans : c’est la "décennie des tentatives". On se pose en tant qu’adulte, on fait des choix professionnels, on s’ancre par le mariage, les enfants, la vie en société.

Entre 35 et 45 ans : c’est "la dernière ligne droite", débouchant sur une crise de l’authenticité. On réalise qu’on est à mi-chemin de sa vie. On fait le point sur soi-même et ses relations. On fait le choix entre continuer à avancer, arrêter de se battre (la solution de retrait), ou changer de vie.

Entre 45 et 55 ans : c’est l’"âge du Renouveau ou de la Résignation". On redéfinit ses priorités, on change ou on renouvelle ses relations, les rôles changent, les enfants quittent la maison, les parents sont âgés ou meurent, le corps change, on prend conscience plus encore de ce qu’on est mortel.

Au-delà de 55 ans, c’est la "Régénération". Acceptation ou rébellion face à la perspective de la retraite qui approche ; amis / mentors meurent ; on fait le point sur sa vie professionnelle ; les relations familiales changent ; le corps change ; on s’accepte tel qu’on est ou non.

 

Kazimierz Dabrowski (1902-1980)

Son parcours de vie, sa façon de vivre, furent à l’origine de sa théorie. Deuxième enfant d’une fratrie de quatre, sa petite sœur meurt d’une méningite alors qu’il n’a que 6 ans, expérience qui influencera sa vision de la mort. Il ne perçoit pas cette dernière comme étant seulement quelque chose de menaçant et incompréhensible, mais comme étant une des plus fortes expériences émotionnelles et cognitives. La première guerre mondiale, qui le touche directement dans ses jeunes années, renforce cette conscience de la mort : une bataille a lieu près de chez lui. Alors qu’il défile au milieu des cadavres, il essaie de trouver un sens à la guerre et aux brutalités qui en découlent. Au cours de ses études dans des instituts catholiques, son meilleur ami se suicide. Alors qu'il souhaitait devenir professeur de musique, il entre en médecine et étudie le comportement humain. Il part étudier à Genève auprès du neurologue et psychologue pour enfants Edouard Claparède et du philosophe et psychologue Jean Piaget. En 1929, il présente sa thèse de médecine : "Les conditions psychologiques du suicide". En 1931, il soutient à Poznan un doctorat de psychologie sur l’automutilation. En 1935, il retourne en Pologne où il met en place l’Institut de santé mentale et d’hygiène qu’il dirigera jusqu’en 1948. En parallèle, il continue d’étudier et se penche sur le cas du polymathe Rudolf Steiner et de l’anthroposophie. La parapsychologie a toujours intéressé Dabrowski, qui pratiquera quotidiennement la méditation tout au long de sa vie.

La 2ème guerre mondiale est difficile : il perd son jeune frère et sa mère est déportée. Son institut est fermé et il en ouvre secrètement un autre dans les forêts de Zagorze dans lequel il accueille des orphelins, des prêtres, des soldats polonais, des membres de la résistance et des enfants juifs. En 1942, il est emprisonné par les Nazis, accusé de complicité avec la résistance polonaise. Sa femme négocie sa libération et Dabrowski récupère son poste à l’Institut de Varsovie. Il témoigne qu’au cours de cette guerre, il a été confronté aux pires bassesses dont l’homme est capable, aussi bien qu’aux actes les plus élevés. En 1948, il obtient une spécialité en psychiatrie et part étudier aux États-Unis la santé mentale, la neuropsychiatrie et la pédopsychiatrie. En 1949, sous Staline, le gouvernement polonais ferme l’Institut et déclare Dabrowski persona non grata. Il fuit avec sa femme avant d’être emprisonné en 1950 pour 18 mois. Il est ensuite autorisé à reprendre ses activités mais sous surveillance du régime. Autorisé à voyager, il participe quand même à plusieurs congrès internationaux de psychiatrie.

Au début des années 60, il rencontre Jason Aronson, éditeur du International Journal of Psychiatry qui l’aide à la traduction de son premier ouvrage en anglais : Positive Disintegration. Refusant de rejoindre les États-Unis car il doit pour cela renoncer à sa nationalité polonaise, il accepte un poste à l’hôpital de Montréal, au Canada. Il passe ses dernières années à enseigner et écrire, partageant son temps entre Alberta, Québec, et la Pologne. Plusieurs publications polonaises et anglaises voient le jour comme Mental Growth though Positive Disintegration (1970), Psychoneurosis Is Not an Illness (1972), The Dynamics of Concepts (1973), et les deux volumes Multilevelness of Emotional and Instinctive Functions (1996).

La désintégration psychique occidentale selon le penseur Julius Evola

L’effondrement actuel de l’occident est à la fois physique, matériel, psychique et moral. On n’est plus au stade de la décadence, mais à celui de la déchéance et de la dégénérescence. L’effondrement de la France devient patent pour des millions de Français, sauf que d’autres millions de Français acceptent cette situation et semblent y nager dedans comme des poissons dans l’eau.

L’occident paie en fait des générations de déchéance accélérée, laquelle a commencé dans les années soixante, qui sonnèrent les débuts du "wokisme" ou de ce que l'essayiste américain Thomas Frank, analyste de la société contemporaine, a appelé la conquête du "cool". A la même époque, Giulio Cesare Andrea Evola, plus connu sous le nom de Julius Evola (1898/1974), philosophe, métaphysicien, poète et peintre italien traditionaliste, évoque quant à lui l’émergence d’un homme fuyant - le "peuple nouveau" de l’autre - qu’il a défini dans son recueil l’Arc et la massue : "L’avènement de la démocratie est quelque chose de bien plus profond et bien plus grave que ce qu’elle paraît être aujourd’hui du seul point de vue politique, c’est-à-dire l’erreur et la prétention infiniment stupide d’une société qui creuse sa propre tombe. En effet, on peut affirmer sans nul doute que l’atmosphère "démocratique" est telle qu’elle ne peut exercer, à la longue, qu’une influence régressive sur l’homme en tant que personnalité et jusque sous les aspects proprement "existentiels" : précisément parce qu’il y a, comme nous l’avons rappelé, des correspondances entre l’individu comme petit organisme et l’Etat comme grand organisme."

L’obsession démocratique occidentale crée un taré qui se veut messianique ! Ainsi lors d'un sommet de l’OTAN* qui a déclaré la guerre woke au reste du monde pas assez occidentalisé... "Le résultat, c’est un nombre toujours croissant d’individus instables et informes, c’est l’invasion de ce qu’on peut appeler la race de l’homme fuyant. C’est une race qui mériterait d’être définie plus précisément que nous ne saurions le faire ici, et sans hésiter à recourir à des méthodes scientifiques, expérimentales."

L’absence de caractère marque cet homme cool, pour qui il est interdit d’interdire : "Le type d’homme dont nous parlons n’est pas seulement rétif à toute discipline intérieure, n’a pas seulement horreur de se mettre en face de lui-même, il est également incapable de tout engagement sérieux, incapable de suivre une orientation précise, de faire preuve de caractère."

Evola pressentait ou constatait déjà le déclin économique et professionnel de l’occidental : "Le déclin de tout 'honneur professionnel' – honneur qui a été une manifestation précieuse, dans le domaine pratique, de la conscience morale et même d’une certaine noblesse – relève en effet du même processus de désagrégation. La joie de produire, selon son art propre, en donnant le meilleur de soi-même, avec enthousiasme et honnêteté, cède le pas à l’intérêt le plus immédiat, qui ne recule ni devant l’altération du produit ni devant la fraude."

Ce foutage de gueule professionnel a gagné tous les domaines, pas que l’économique, qui se limite à imprimer des billets sans valeur : le militaire, l’éducatif, le religieux (de Vatican II à Bergoglio, l'actuel pape noir), l’informatif. Il est normal du reste que cela "ne choque plus personne".

La résistance ? Elle clique… Evola constatait la déchéance du politique qui est déjà – qui est depuis toujours – l’abomination de la désolation :

"Quant à l’univers des politiciens, avec ses combines et la corruption qui ont toujours caractérisé les démocraties parlementaires mais qui sont encore plus évidentes aujourd’hui, ce n’est même pas la peine d’en parler, tant la race de l’homme fuyant, identique au-delà de toute la diversité des étiquettes et des partis, s’y meut à son aise."

Et les pires sont ceux de droite : "Il faut en effet observer que, très souvent, ne font pas exception ceux qui professent des idées 'de droite', parce que chez eux ces idées occupent une place à part, sans rapport direct et sans conséquence contraignante, avec leur réalité existentielle."

Evola constatait que tout le monde est déjà concerné par cette involution en occident, vous comme moi :« Nous avons dit que ce phénomène ne concerne pas seulement le domaine moral. L’instabilité, le côté évasif, l’irresponsabilité satisfaite, l’incorrection désinvolte se manifestent jusque dans les banalités de tous les jours. On promet une chose – écrire, téléphoner, s’occuper de ceci ou de cela – et on ne le fait pas. On n’est pas ponctuel. Dans certains cas plus graves, la mémoire même n’est pas épargnée : on oublie, on est distrait, on a du mal à se concentrer. Des spécialistes ont d’ailleurs constaté un affaiblissement de la mémoire parmi les jeunes générations : phénomène qu’on a voulu expliquer par différentes raisons bizarres et secondaires, mais dont la vraie cause est la modification de l’atmosphère générale, laquelle semble provoquer une véritable altération de la structure psychique. Et c’était avant le smartphone...

La déchéance de la mémoire ayant pour Evola des conséquences ontologiques, ses observations permettent de comprendre l’attitude débile des leaders occidentaux maintenant face à la Russie ou à la Chine, qui sont en train de les manger tout crus...

Les restes de civilisation ou d’éducation de temps antérieurs ont disparu et l’occident est nu, avec une population crétinisée à 90%, face à sa désintégration psychologique, matérielle et morale, et donc incapable de réaliser ce qui lui arrive pour réagir.

Motif d'espérance, Céline disait que toute débâcle est un coup de grâce...

* L’Organisation du traité de l'Atlantique Nord est l'organisation politico-militaire mise en place par les pays signataires du traité de l'Atlantique Nord afin de pouvoir remplir leurs obligations de sécurité et de défense collectives.

Sources : Julius Evola – "La race de l’homme fuyant, l’Arc et la massue".

 

Les fondements de la désintégration positive

 

La théorie de la désintégration positive (TDP) est issue des observations réalisées par Kazimierz Dabrowski tout au long de sa vie, tant auprès de ses patients que de son entourage. Son expérience de la guerre, les emprisonnements, le suicide de son ami, la mort de sa sœur, sont autant de jalons qui ont marqué sa conception du monde. Ayant constaté que les émotions prédominaient sur l’intelligence, la raison, la logique, il a essayé de comprendre ce qui faisait que certains êtres humains pouvaient être capables des pires bassesses alors que d’autres étaient portés par des valeurs morales élevées, prêts à se sacrifier pour les autres.

La TDP est une théorie très complexe, nécessitant une lecture approfondie de ses écrits. Elle est aujourd’hui très utilisée au Canada et aux États-Unis, ses équipes ayant continué à développer des outils pratiques. On retrouve des centres d’études au Pérou, en Espagne, en Turquie aussi bien qu’en Australie, la plupart consacrés aux enfants et adultes surdoués.

 

Elle est une théorie de développement de la personnalité, celle-ci n'étant pas considérée comme innée mais acquise. Aussi elle va à l'encontre de l'opinion majoritaire en psychologie, qui décrit la santé mentale par l'absence de symptômes ou homéostasie. Or pour Dabrowski, le fait d'être très bien intégré socialement, d'avoir un seuil de tolérance à la frustration élevé et de bonnes facultés d'adaptation, n'est pas pour autant signe de santé mentale. Il n'est qu'à voir nombre de nos contemporains dits représentatifs du système en place... En effet, il considère la santé mentale comme la capacité à se développer positivement grâce au processus de la désintégration positive, l'individu en cours de développement passant généralement par des crises et de grandes souffrances psychologiques. Si elle est regardée du point de vue répandu de la psychiatrie, elle sera considérée comme "malade". Pas du point de vue de la théorie de la désintégration positive.

 

Une personnalité "acquise"

A la différence de l'individualité innée, ses principales caractéristiques sont :

- La conscience de soi : la personne a un haut niveau de compréhension d'elle-même, de sa structure, de ses aspirations et de ses buts.

- L'affirmation de soi : la personne est convaincue que son attitude est juste et que ses buts sont essentiels.

- L'éducation de soi : la personne est consciente que son développement n'est jamais terminé et elle travaille donc à son propre développement et à l'éducation d'elle-même.

Cette conception bouscule la vision scientiste traditionnelle, qui voit l'inné con-sacré au détriment de l'éveil de conscience. Ou comment éviter que les "robots biologiques" viennent bousculer l'ordre établi ...

 

Typologie du développement personnel

 

Trois états d'être caractérisent le développement de l'être humain.

Le premier est la détermination biologique, qui, comme son nom l’indique, est associée au cycle de vie ontogénétique, c'est-à-dire l'intégration et la progression des fonctions à travers les différents âges de la vie des individus. Elle inclut une conformité à l’environnement social, les individus ajustant leurs comportements afin qu’ils entrent en concordance avec leurs conduites biologiques. Aussi les normes et contraintes sociales contrôlent les conduites.

Le deuxième est l'autonomie mentale, les forces mentales propres à l’individu se combinant à des valeurs positives pour lui permettre un développement direct. Ce type de développement transcende les " dictats " de la biologie et de la société, souvent marqué par des désintégrations/réintégrations ainsi que par les (in)adéquations positives et négatives.

A l'inverse, le troisième est lié à une vision du monde égocentrique et antisociale. Ce type de développement se manifeste dans des états mentaux tels le mal-être, les peurs, des obsessions et phobies, des conflits intérieurs, de la paranoïa ou les comportements pathologiques criminels. L’inadéquation négative est typique de ce développement, les individus régulant leurs comportements afin de parvenir à leurs propres fins, sans s’occuper de ce que cela peut coûter aux autres. Le rejet des valeurs de la société est de nature négative, puisque seule importe la gratification des besoins primaires et égocentriques.

 

Pour Dabrowski, le développement avancé de l’humain ne consiste pas à réussir les différentes étapes de sa vie en obtenant des biens matériels ou des gratifications sociales. Il consiste à transcender les instincts et les conduites biologiques, ainsi que le besoin de se conformer inconsciemment aux normes de la société. Un humain développé se caractérise par des traits tels que l’autonomie, l’authenticité, l’altruisme, permis par la multiplicité des niveaux des fonctions émotionnelles et instinctives qu'il met en œuvre.

 

Facteurs de développement

 

En sus de ces types de développement, Dabrowski identifie trois facteurs ou leviers de développement.

Tout d'abord, l'instinct et le potentiel de développement. Ils sont héréditaires. Le premier est lié à l’instinct de survie et constitue la force initiale permettant de transcender certaines conduites primaires, notamment si l’auto-préservation est en jeu. Quant au potentiel de développement, il est la dotation constitutionnelle de l'individu, qui détermine son caractère et l’extension possible de sa croissance mentale. Le potentiel de développement est notamment puissant chez les personnes dotées d'une excitabilité accrue, propriété du système nerveux central. Les individus dotés d‘hyperexcitabilité perçoivent la réalité d’une manière différente, plus intense.

5 formes d’excitabilités accrues sont identifiées, pouvant être combinées :

. L’hyperexcitabilité psychomotrice : elle se caractérise par une grande énergie, de la curiosité, la difficulté de rester assis, le besoin constant de changer.

. L’hyperexcitabilité sensuelle, qui se traduit par une sensibilité aux perceptions sensorielles.

. L’hyperexcitabilité imaginative, qui se traduit par une inclinaison à la rêverie, par la présence d’une vie intérieure riche, fantasque, et par une grande créativité.

. L’hyperexcitabilité intellectuelle, se caractérisant par une habileté pour les analyses et synthèses, par des questionnements pertinents et par un besoin d’apprendre par soi-même.

. L’hyperexcitabilité émotive, qui concerne les individus sensibles vivant des émotions intenses et prenant les choses à cœur. Ils sont empathiques et ressentent un fort besoin d’avoir des relations exclusives.

 

Ensuite l’environnement social. Ses effets sur l’individu dépendent de sa dotation, en amont, en potentiel de développement. Si un individu possède un potentiel de développement fort, la qualité de l’environnement social sera de seconde importance. Ces individus ont une résilience innée et une large imperméabilité à leur environnement social. En revanche, la qualité de l’environnement social est un facteur important lorsque le potentiel de développement est faible.

 

Enfin le dynamisme. Ce facteur n’apparaît que lorsque les deux autres ont été activés. Il est la force par laquelle un individu devient davantage autodéterminé, et qui lui permet de contrôler ses comportements en fonction de ses propres valeurs. Une fois ce facteur activé, les individus ne restent plus longtemps à la merci des besoins biologiques et des conventions sociales. Ils conduisent leur vie de manière consciente et délibérée, en fonction des valeurs qu’ils souhaitent suivre. A ce niveau de développement, les individus prennent en charge leur propre éducation et leurs propres souffrances. En effet, la conscience de soi implique la conscience de son propre fonctionnement mental, de son identité personnelle et unique, et de la stabilité différentielle des caractéristiques personnelles. En effet, si certains traits de personnalité ne sont pas plus stables que d’autres, certains sont considérés comme plus importants. La conscience permet à l’individu de s’engager dans cet autocontrôle. Le dynamisme conduit à un fonctionnement mental complexe qui sera développé à la fin de la partie consacrée à la désintégration positive.

 

Principes d’intégration et de désintégration

 

En se basant sur la typologie du développement personnel préalablement évoquées, Dabrowski élabore une théorie de la personnalité dans laquelle les individus oscillent tour à tour entre intégration et désintégration. Il dégage ainsi 5 niveaux de développement personnel, niveaux qui ne sont pas réels dans le sens où il n’y a ni début ni fin dans la manière d’évoluer.

Chaque individu possède un "centre de gravité", ou niveau dominant, dans lequel il fonctionne émotionnellement et intellectuellement. Les facteurs ou leviers du développement ne sont pas tous activés uniformément.

Il existe 2 types d’intégration – primaire et secondaire – et 4 types de désintégration – positive, négative, partielle et globale. Les émotions négatives constituent la clé permettant d’évoluer entre intégration et désintégration, de cheminer intérieurement.

 

Typologie du développement personnel (rappel)

Détermination biologique

Autonomie mentale

Vision égocentrée et antisociale

 

Facteurs de développement (rappel)

Instinct et potentiel de développement

Environnement social

Dynamisme


L’intégration primaire (niveau I)

 

L’intégration primaire caractérise les individus qui sont largement sous influence du l'état de détermination biologique et du facteur qu'est l'environnement social*. L’organisation mentale est dédiée à la gratification des instincts biologiques de l’individu, y compris les besoins sociaux. Les attributs, telle l’intelligence, sont mis au service d’un intérêt personnel. Les réponses comportementales sont généralement automatiques. De ce fait, la prise de conscience est faible, éphémère, voire inexistante. On parle d’état de semi-conscience. Le conflit est typiquement ciblé sur le monde extérieur et reflète la frustration liée aux besoins primaires, au manque de reconnaissance sociale.

Au niveau le plus basique de l’intégration primaire, se situent les individus qui ne sont influencés que par l'état de leur détermination biologique et qui n’ont aucune conscience de leurs actes. Ce sont des sociopathes : seule compte la gratification de leurs besoins, les autres n’étant considérés que comme objet permettant d’arriver à leurs fins. A l’autre extrémité du niveau, se situent les individus qui sont influencés par l’environnement social. Ils sont extrêmement socialisés : leur façon d’être au monde est hautement sociale, conforme. Ils ont besoin de l’approbation des autres.

Pour Dabrowski, ce premier niveau n’entre pas dans le cadre du développement psychologique puisque qui dit développement implique une désintégration de l’organisation mentale de cette intégration primaire, prise de conscience de ce qui est. Mais ce niveau est important puisque c’est dans l’intégration primaire qu’apparaissent les symptômes psychonévrotiques, lorsque l’individu prend conscience de la différence existante entre ce qu’il souhaite être et la réalité.

* Le niveau assez élevé d'intégration primaire est présent chez l'individu moyen (entre 60 et 70% des personnes), et un niveau très élevé est présent chez le psychopathe compte-tenu de son absence d'empathie et de conflits intérieurs. Si la personne psychopathe peut être très intelligente, son intelligence est entièrement subordonnée à ses besoins primaires.

 

La désintégration à niveau unique (niveau II)

 

Il s’agit de la première instance de désintégration. Elle est provoquée par un élément marqueur (puberté, ménopause, échec scolaire ou professionnel, faillite, problèmes relationnels, rupture sentimentale, décès d’un proche, etc.) qui génère d’intenses émotions négatives conduisant à l’incertitude. Pour Dabrowski, les individus ne peuvent effectuer la transition des bas niveaux de fonctionnement mental aux niveaux plus élevés que par l’expérience de leurs propres conflits internes. Si l’identité devient confuse, changeante, le sens du moi n’est pas encore complètement développé. De ce fait, la désintégration s’effectue sur un mode horizontal : l’individu est tiraillé dans un sens, puis dans l’autre, mais se perçoit toujours en adéquation avec la société. Les personnes qui évoluent au sein de ce niveau sont soumises à une autorité extérieure par laquelle elles se caractérisent : "je suis la femme de…", "le fils de…", "le chef de…", "le collaborateur de…", etc. Une crise survient lorsque l’autorité est jugée mauvaise, trompeuse, abusive.

 

La plupart des individus chercheront une autre autorité sous laquelle se placer, qui soit davantage en accord avec leurs valeurs et par rapport à laquelle ils pourront se redéfinir. C'est pourquoi Dabrowski la nomme intégration partielle ou adaptative. Toutefois, la désintégration à niveau unique ne doit pas être négligée, les personnes qui n’arrivent pas à retrouver de nouvelles valeurs ne pouvant soutenir émotionnellement cette perte de repères. La prolongation d’un tel état conduit le plus souvent à des tendances suicidaires ou à la psychose. Les individus se tournent vers l’automédication, l’alcool, les drogues, afin de faire taire ces émotions négatives. Dabrowski insiste fortement sur la nécessité de ne surtout pas nier ou balayer ces émotions négatives lors d’une thérapie. Il est important, au contraire, d’aider les personnes à comprendre et accepter ces émotions négatives afin qu’elles puissent évoluer.

 

La désintégration stratifiée spontanée (niveau III)

 

Ce niveau requiert une dotation certaine en potentiel de développement, et plus spécifiquement un niveau d’excitabilité accrue, ainsi que la présence du facteur le dynamisme.

La perte de l’intégration primaire, amorcée au niveau précédent, est transformée en un examen spontané et volontaire des croyances, pensées, attitudes et émotions, suivi d’une répudiation des valeurs antérieures. Diverses formes d’émotions négatives et d’attitudes d’autocritique, propres à la dynamique de dissolution, initient le processus de création d’un intérieur renouvelé, accroissant ainsi la prise de conscience. L’émergence de ce niveau résulte d’une révolution de la perception tant de soi que du monde et de l'univers. Les individus ne se satisfaisant plus des besoins primaires et de l’adhésion automatique aux normes de la société, commence alors un processus de transformation afin de concilier ces nouvelles valeurs personnelles avec celles de la société.

Comme le dynamisme de développement joue un rôle fondamental dans les processus d’évolution de l’individu, Dabrowski distinguent ceux qui n’en sont pas dotés – les "conserveurs" – de ceux chez qui le dynamisme est présent – "les transformeurs". Les concepts de hiérarchie des valeurs peuvent être présents chez les deux, mais les sujets conserveurs ne possèdent pas la transformation psychique permettant de transformer les idéaux en action. Ce concept de transformation psychique est le processus par lequel le travail spécifique de restructuration personnelle s’exécute.

 

La désintégration stratifiée organisée (niveau IV)

 

La principale caractéristique de ce niveau est que la conscience individuelle contrôle le cours du développement. Alors que le niveau III est dominé par les dynamismes de désintégration, ce niveau voit croitre les dynamismes de développement, comme l’autonomie, l’authenticité, l’auto-éducation et l’auto-psychothérapie, liés au facteur le dynamisme. L’individu développe un sens élevé de responsabilité envers lui-même et envers les autres. Ce niveau initie l’intégration secondaire au fur et à mesure que l’individu devient auto-éduqué et qu’il s’auto-améliore. L’auto-psychothérapie est un processus d’éducation et de conduite personnelle des épisodes de stress, l’habileté à prendre en charge sa souffrance, qu’elle soit d’origine interne ou externe.

La responsabilité envers soi-même et envers les autres consiste à prendre la responsabilité de ses propres actions, pensées et désirs, en fonction du contexte de sa propre vie et en relation avec les autres. L’autonomie est le dynamisme par lequel les individus s’affranchissent consciemment de leurs conduites sombres et des aspects de l’environnement social qui s’opposent à leurs valeurs positives. L’authenticité, basée sur la conscience de soi, est l’expression des émotions, réflexions et attitudes. Cela consiste à être en adéquation avec sa propre échelle de valeurs.

Un centre attentionné et responsable détermine le comportement de l’individu, aussi bien à court terme qu’à long terme, et travaille à harmoniser la personnalité. La personnalité idéale est le standard à l’aune duquel l’individu évalue sa propre personnalité.

 

L’intégration secondaire (niveau V)

 

Au sommet du développement humain, la personnalité est achevée. L’individu expérimente l’harmonie et est en paix avec lui-même. Il vit selon sa personnalité idéale, son comportement étant dirigé par la construction d’une hiérarchie de valeurs. Virtuellement, aucun conflit intérieur n’est expérimenté depuis que les formes inférieures de motivation ont été détruites et remplacées par des formes élevées d’empathie, d’autonomie et d’authenticité.

 

Nature des désintégrations

 

L’individu peut passer d’un niveau à un autre via des processus que Dabrowski nomme désintégration et intégration. La désintégration est un processus double : la dissolution des structures et fonctions mentales inférieures amène à la création de formes plus élevées. Pendant la dissolution, les individus expérimentent des conflits internes et externes qui génèrent d’intenses émotions négatives. Une telle expérience peut être provoquée ou déclenchée par des jalons dans le développement, comme la puberté, ou des crises suite à la mort d’un être cher. A ce stade, il convient de bien différencier les phases de développement des états de développement qui sont séquentiels, relatifs à l’âge et universels. Dans la théorie de la désintégration positive, il n’y a pas de critère d’âge associé à chaque niveau. Les niveaux ne sont pas non plus universels. Un individu ne passe pas par les différents niveaux de développement au cours de sa vie : un niveau domine, et seul un conflit intérieur majeur peut permettre la désintégration permettant d’accéder – si les conditions s’y prêtent – à un autre niveau. De telles expériences détruisent l’organisation mentale préexistante qui guidait le comportement de l’individu.

 

La désintégration est dite positive quand l’individu adhère, en toute conscience, à des valeurs morales élevées, correspondant à sa personnalité idéale.

La désintégration est dite négative quand l’individu n’expérimente qu’une partie de la désintégration, la partie de dissolution, et se retrouve piégé, incapable de retourner à un état d’intégration antérieur. L’individu ne se reconnaît plus dans les valeurs qui étaient siennes avant mais ne parvient pas à en créer de nouvelles qui lui sont propres. Les maladies psychotiques chroniques et suicides constituent des expressions communes de désintégration négative.

La désintégration partielle permet une sortie moins dramatique et résulte de plusieurs conséquences : un retour à un niveau de fonctionnement inférieur, une intégration partielle à un niveau plus élevé, ou une transformation vers une désintégration globale.

 

Désintégration positive et concept de santé mentale

 

Dabrowski est avant tout un praticien. Psychiatre et psychologue, il a été amené à réfléchir sur le concept de santé mentale et sur l’importance des conflits intérieurs, avec comme pré-requis que les émotions priment sur l’intelligence dans le développement de la personnalité. C'est pourquoi sa conception de la santé mentale va à l'encontre de l'approche médicale classique, celle-ci laissant peu à peu place au concept de bien-être, de satisfaction de vie.

 

Un autre regard sur la notion de santé mentale

 

Ainsi conteste-t-il que la santé mentale corresponde à l'absence de désordre mental. A ses yeux, beaucoup de soi-disant états mentaux ou désordres pathologiques ne tiennent pas de la maladie, mais sont des processus nécessaires au développement personnel. Des états mentaux comme l’excitabilité accrue et la majorité des névroses et psychonévroses constituent "une condition nécessaire au développement clair et multipartite et sont l’une des conditions basiques de santé mentale, non des désordres".

De même, la santé mentale n'est pas un état d’intégration psychologique de facultés mentales fonctionnant en douceur, sans disharmonies ou interruptions. Il rappelle que les disharmonies et désintégrations constituent le noyau des hyperexcitabilités. Sans ces formes de développement positif des névroses et psychonévroses, le développement de la personnalité à multiples niveaux serait impossible. L’excitabilité accrue, qui est associée à une a synchronie de développement comme la douance (fait d'être surdoué) ou la créativité, introduit par sa seule présence disharmonie et chaos, en augmentant dans le même temps les dynamismes qui guident et accélèrent le développement. C’est en rencontrant des obstacles et frustrations dans la réalisation de ses buts que l’individu expérimente les conflits internes et externes. A cause de ces conflits, un individu doté d’un haut potentiel de développement devient plus introspectif, davantage capable de faire des choix et par conséquent plus conscient de la hiérarchisation de ses sentiments, pensées et comportements. Un individu mentalement sain possède la capacité de subir une désintégration positive ainsi que des intégrations secondaires partielles dans les hauts niveaux de développement, qui peuvent conduire à la formation d’une personnalité au niveau de l’intégration secondaire globale.

Enfin, Dabrowski souligne l’importance de l’imagination et de l’intuition dans le développement accéléré. Il note que beaucoup de traits humains et de comportements associés à l’efficacité et à la productivité sont souvent des indicateurs d’un ajustement stéréotypé et indifférencié aux conventions sociales, et qu'ils impliquent une intégration primaire à niveau unique. "Efficacité et productivité comme traits permanents de caractère dans son ensemble ne peuvent être harmonisés au développement positif et accéléré, à la créativité, à l’originalité. Ces traits sont souvent rencontrés chez les individus primitifs, stéréotypés, exhibant de fortes réactions automatiques, lesquelles sont fréquemment l’expression de caractéristiques pathologiques".

 

Variantes d'adaptation d'un individu à la société

Dabrowski introduit 4 concepts pour décrire l'adaptation d'un individu à la société :

– L’inadaptation positive : inadaptation aux tendances des bas niveaux dans son propre comportement et dans les influences avec l’environnement.

– L’inadaptation négative : maladies mentales et désordres.

– L’adaptation positive : ajustement dynamique aux hauts niveaux dans la hiérarchie de valeurs, de buts, de réalité, exprimé à son extrémité par la personnalité idéale. Ajustement "à ce qui doit être".

– L’adaptation négative : ajustement à la réalité, aux valeurs et buts des bas niveaux de la norme statique, ajustement "à ce qui est".

Le critère de l’ajustement effectif à la réalité comme signe de santé mentale est typiquement utilisé pour décrire un ajustement négatif, basé sur l’acceptation des normes sociales et comportements. C’est une attitude de compromis, souvent adoptée sans réflexion, de statu quo, dans lequel l’individu manque d’habileté à créer ses propres réalités et convictions et se soumet facilement aux idéologies afin d’assurer son statut ou ses biens matériels. A l’extrémité de l’ajustement négatif se situent les psychopathes qui mettent leur intelligence au service de leurs besoins primaires.

 

Santé mentale et équilibre psychologique

 

L’équilibre psychologique, concept populaire dans les approches biologiques et psychanalytiques de la santé mentale, est un état de balance entre les forces majeures qui gouvernent le comportement – ajustement aux conditions changeantes – et le fonctionnement psychologique effectif.

Cette idée de balance comme état optimal et désirable de fonctionnement psychologique trouve de nombreux supports dans la sagesse commune, qui défend l’approche de vie de l’homme doré, caractérisé par l’harmonie et l’absence d’excès. Pour Dabrowski, cette approche reflète le niveau horizontal, une vie humaine centrée sur des activités destinées à combler les impératifs biologiques, sans tensions majeures ou bouleversements. Il y a de fait incompatibilité avec la conception des niveaux multiples du développement humain présentés dans la Théorie de la Désintégration Positive, laquelle postule que développement de la personnalité, créativité et authenticité progressent au travers de conflits personnels, de graves expériences émotionnelles, de dépressions, anxiétés, obsessions, inhibitions, efforts pour transcender son propre cycle biologique et son type psychologique, via la désintégration positive. L’état d’équilibre psychologique prolongé est considéré, par Dabrowski, comme symptomatique de psychopathologies. Dans les hauts niveaux de développement, l’équilibre psychologique est qualifié de "déséquilibre modéré".

 

Un concept de santé mentale spécifique

 

La définition de la santé mentale par Dabrowski est la suivante : "Capacité de développement vers les hauts niveaux multidimensionnels de hiérarchie de réalité, de compréhension, d’expérience, de découverte, de création et d’élévation des valeurs, pour atteindre tant la personnalité idéale que l’idéal social". La santé mentale n’est pas un état mais un processus. La personnalité constitue le but ultime, résultant du développement issu de la désintégration positive.

Il existe pour lui 3 types de développement :

– Ordinaire, basé sur un bas potentiel de développement.

– Partiel / unilatéral, basé sur un fort talent ou sur une attribution particulière d’habilités.

– Accéléré, associé à un fort potentiel de développement.

 

Dabrowski évoque la santé mentale de personnes dites normales, d’individus éminents et de personnalités engagées.

 

La santé mentale de l’homme normal est caractérisée par un ajustement relativement aisé aux changements de conditions de vie (adaptation négative). Si d’occasionnelles périodes d’inadaptation touchent ces individus, elles ne sont guère intenses ou longues, et ne laissent le plus souvent pas de marques permanentes sur la psyché. Les individus ordinaires sont en général efficients, efficaces et productifs dans leurs activités, capables de surpasser leurs difficultés et de se focaliser sur leurs besoins primaires. Le but de leur vie est souvent caractérisé par une carrière réussie, une richesse matérielle, un statut social élevé, et un degré d’influence sur les autres. Leur vie émotionnelle est caractérisée par l’équilibre. S’ils expérimentent la tristesse ou de dépression, par exemple, ces expériences tendent à être modérées et ne conduisent pas à des efforts d’auto-transformation. Leur vie spirituelle est en cohérence avec les normes sociales et est typiquement définie par les stéréotypes religieux.

 

Les individus éminents exhibent une forte ambition concernant la réalisation de leurs talents particuliers. Leur croissance psychologique est limitée à ce développement unilatéral de leur talent, et les domaines de vie sont étroitement associés à cette réalisation. Dans leur maquillage psychologique, on peut observer quelques divergences de développement significatives autour de certaines fonctions. C’est particulièrement évident que le talent dominant ou les habiletés concernent les mathématiques, la physique, les habiletés techniques ou politiques. Ces individus, comme l’observe Dabrowski, n’exhibent pas ou peu de désir de réveiller ou développer leur milieu intérieur, et ne sont pas intéressées par l’auto-transformation. Ils montrent un manque d’empathie dans leurs relations avec les autres, et parfois sont agressifs, voire peuvent faire preuve de cruauté. Il existe un petit risque de désordres mentaux.

 

Les individus engagés dans le développement accéléré, ou fonctionnant au niveau de la personnalité, illustrent sur un plan hiérarchique, multipartite, stratifié, ce que doit être la santé mentale. Ils se focalisent sur le développement de leur propre milieu psychique et consacrent autant d’efforts à aider les autres. Ils se dévouent à la réalisation de leurs valeurs hiérarchiques exponentielles et réalisent de gros efforts afin d’accroître et affermir les parties sous-développées de leur personnalité. Ils exhibent des signes d’excitabilités psychiques croissantes – en particulier en ce qui concerne les excitabilités émotionnelles, imaginatives et intellectuelles – et visent à transcender les approches stéréotypées des différentes aires de vie, comme l’éducation, la sociologie, la psychologie, la psychopathologie, la philosophie. Leur histoire est emplie d’expériences difficiles associées à des besoins de transformation intérieure et d’auto-perfectionnement. Ces expériences incluent souvent névroses et psychonévroses, nécessaires dans cette tentative toujours plus poussée de compréhension de la réalité, de création de la réalité. Leur attente envers leur propre personne et envers les autres est basée sur une perception claire de l’idéal de personnalité, autant vis-à-vis des individus que de l’essence sociale.

Seul ce dernier groupe, porté par la désintégration positive, correspond à la définition de ce qu’est la santé mentale. Ces individus servent de modèle au reste de la population afin de montrer ce qui devrait être.

 

Dabrowski met en garde contre le fait d’utiliser les critères basiques, comme l’utilité ou l’efficacité, pour évaluer les phénomènes multiples. Créativité, développement de la personnalité, santé mentale, sont autant d’éléments qui ne peuvent être appréhendés à partir de ces critères basiques. Promouvoir les standards basiques de santé mentale permet aux individus psychotiques d’acquérir pouvoir et proéminence, qu’ils utilisent de manière destructrice dans la poursuite de leurs buts primitifs et souvent inhumains. En pathologisant les expériences désintégratives associées à la création et à l’auto-transformation, on stigmatise les individus se dirigeant vers une croissance accélérée, et on ajoute une couche à leur accablement au lieu de les aider à se lever. On réduit également la possibilité d’avancement de la société de la platitude et de la complaisance hédoniste vers les hauts niveaux de développement, ou tout au moins vers leur reconnaissance et leur appréciation.

 

 

La vraie thérapie, c'est à tout moment, en toutes conditions, et certainement pas guidée par quelqu'un que nous payons, mais par sa propre guidance supérieure qui place les expériences dont nous avons précisément besoin sur notre chemin.

 

 

 

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